H1N1, autopsie d'une psychose organisée

    Thierry Vissac - 30 avril 2009 -

 

 

 

 

Après la « vache folle » et la « grippe aviaire », qui ont fait trembler les populations pour rien, la grippe dite A(H1N1), pour son nom scientifique[1], ou « grippe mexicaine », « grippe porcine », « grippe nord-américaine », « grippe nouvelle » (pour rappeler « l’ancienne » de 1918, sans doute, appelée « grippe espagnole » et qui a fait environ 30 millions de morts) est un nouvel exemple édifiant de manipulation collective par le biais des médias (et selon les scénarios plausibles ou conspirationnistes : un test à l’échelle planétaire des réactions des populations en cas d’alerte [2], une entreprise commerciale éclair[3] ou le test militaire d’un nouveau virus concocté de main humaine[4], voire les trois en même temps).

 

Au-delà des spéculations les plus folles, il y a des faits : dès les premiers jours, alors que les cas de décès avérés à la suite de cette grippe étaient inférieurs à 5 au total (et sachant que la grippe classique hivernale tue jusqu’à 500 000 personnes tous les ans[5] sans qu’on en fasse une alerte d’un tel niveau[6], même la rougeole pour laquelle il existe un vaccin provoque 750 000 décès par an), la menace était présentée par tous les médias comme majeure (le terme « pandémie » (épidémie à grande échelle) a été utilisé très rapidement, contredisant le fait qu’une épidémie mineure se produisait seulement dans la ville de Mexico).

 

On pourrait, bien sûr, parler d’un simple excès de prudence, d’une protection préventive paternaliste des populations, d’une occasion de montrer que les nations sont prêtes à toute éventualité (« Les scientifiques s’accordent à dire qu’il y a une pandémie mondiale tous les siècles » dit-on). Mais de telles démarches pouvaient se faire avec subtilité alors que  les titres et les unes des journaux choisissaient de ne pas reprendre les chiffres les plus fiables de l’Organisation Mondiale de la Santé (je ne dis pas que les chiffres de l’OMS sont nécessairement fiables, mais qu’ils ne sont pas ceux utilisés par les médias alors qu’ils étaient relativement bas) mais systématiquement les plus alarmistes. Ainsi, les chiffres des décès qui circulaient étaient plus proches de la centaine dans la même période et les titres ne faisaient pas dans la dentelle (« Alerte mondiale à la grippe porcine » (Le Monde), « Grippe porcine, état d’urgence » (Le Figaro)).

 

L’OMS a placé cette « menace » au niveau 5 sur une échelle de 6 en moins d’une semaine. Le secrétaire des Nations Unies, Ban Ki-moonn, a fait une de ces annonces ambigües : « Nous sommes préoccupés par le fait que ce virus pourrait causer une nouvelle pandémie de grippe. Il pourrait être bénin dans ses effets comme il pourrait être potentiellement grave » et a demandé que les fabricants de vaccins anti-grippaux soient mobilisés afin de contribuer à la production de vaccins contre la pandémie et aux fabricants de médicaments anti-grippaux de tout faire pour optimiser leur production.

 

Selon le Dr Anne Schuchat, du Centre de contrôle et de prévention des maladies des Etats-Unis, le virus est sensible à deux médicaments, le Tamiflu et le Relenza dont les fabricants, dans un élan généreux et instantané de solidarité, ont tout de suite indiqué qu’ils allaient en augmenter la production (et cela après que les pharmacies aient été dévalisées de leurs stocks dès le premier jour de ces annonces [7]. On apprend par ailleurs que Sanofi-Aventis va construire une usine pour produire des vaccins saisonniers et pandémiques contre la grippe au Mexique Source ).

Mais les gouvernements se voulaient rassurants dans le même temps, par exemple en déclarant que « Voyager en avion est sûr. Emprunter le métro est sûr » et « Les gens doivent continuer à sortir et à vivre normalement. » Source . Il y a réellement peu de chances que cela soit rassurant suite à la pluie de titres terrifiants.

 

En plus de la psychose rampante, d’autres effets secondaires de ces annonces irresponsables ou mal intentionnées se sont manifestés. Le parlement égyptien, par exemple, malgré l’affirmation (tardive, il est vrai) que le virus n’était en fait pas présent chez le porc, a ordonné le massacre immédiat de ses  250 000 cochons (Source). On peut noter, au passage, que l’origine de ce virus se trouverait dans un élevage intensif américain[8] de porcs au Mexique qui a enfreint toutes les règles d’hygiène, les normes écologiques et de simple respect des animaux (Source).

 

Ma conclusion

 

Quoi qu’il en soit, on peut en effet observer la réaction des populations à l’occasion de cette mascarade. Et il semble bien que le pourcentage de personnes inquiètes soit assez élevé et que bon nombre de celles qui se disent tranquilles vont tout de même faire leurs stocks de masques, de médicaments quand ce n’est pas de nourriture ! Devant de telles réactions, pourquoi des individus sans scrupules (l’effondrement des bourses nous a récemment confirmé leur existence) ne profiteraient-ils pas cycliquement de ce phénomène de psychose pour enfler encore un peu plus leurs comptes en banque ou tester les méthodes de contrôles de populations ? Même à travers le filtre grossissant des médias, je ne lis rien qui indique qu’il y ait une menace réelle (et cela même si l’un d’entre nous devait être atteint par un virus de grippe dans les semaines à venir). Mais si nous sommes si peu à le voir de cette manière, il reste à inviter les populations à plus de « conscience » et à cesser d’être les jouets des médias et des effets d’annonce officiels qui reflètent surtout l’état d’une société moribonde où les intérêts les plus sordides priment sur la protection des valeurs spirituelles et humanistes.

Thierry Vissac, 30 avril 2009

 

Notes et sources :

 

[1] Certains ont proposé « grippe médiatique ».

[2] Ban Ki Moon, secrétaire de l’ONU, a déclaré que cette pandémie donnerait l'occasion de tester le système de réaction de la communauté des nations face à une pandémie, mis en place depuis 2007. Le professeur Daniel Vittecoq, directeur des maladies infectieuses à l'hôpital Paul Brousse et membre du comité de pilotage de l'Assistance Publique -Hopitaux de Paris déclare :  « Tant pis si c'est excessif, c'est un exercice qui prépare au risque pandémique ».

[3] Ban Ki Moon, secrétaire de l’ONU, a demandé que les fabricants de vaccins anti-grippaux soient mobilisés afin de contribuer à la production de vaccins contre la pandémie et aux fabricants de médicaments anti-grippaux de tout faire pour optimiser leur production.

[4] Le Dr Anne Schuchat, membre du Centre de contrôle et de prévention des maladies des États-Unis (CDC), a déclaré que les cas américains étaient le résultat d'une recombinaison virale d'éléments génétiques provenant de quatre virus différents : la grippe porcine nord-américaine, la grippe aviaire nord-américaine, la grippe humaine du type A du sous-type H1N1, et d'un virus de la grippe porcine que l'on trouve typiquement en Europe et en Asie – « un mélange exceptionnel et jamais rencontré de séquences génétiques ».

[5]  Source : Site de L'OMS  

[6] Les grippes saisonnières touchent entre 5% à 15% de la population alors que la grippe mexicaine n’a touché qu’un pourcentage extrêmement faible de la population Source.

[7] Rupture de stocks dans les pharmacies Suisse  française et québecoises pour les masques de type FFP2 et pour les médicaments indiqués.

[8] Smithfield foods sur le plateau de La Gloria Source

    

Les sites des informations officielles :

Dossier de l’OMS sur cette grippe

Centre européen de prévention et contrôle des maladies aux États-Unis

Le site gouvernemental français sur « la pandémie »

 

Quelques (rares) sites critiques :

Sur Nordenstar Quels intérêts ?

Sur Le Post « Il paraît qu’on est prêt »

 

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