> ISTENQS, Topless par Thierry Vissac

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Performance

Thierry Vissac   (Octobre 2015)

 

La grande plaie des spiritualités libres du 20° siècle (encore persistante de nos jours) est la tendance à promouvoir la performance, le fantasme d’être « au top » en permanence, comme dans les canons de la société de consommation. La notion d’éveil spirituel est lourdement chargée de ce rêve impossible. Il faudrait donc être en santé parfaite, libre de tout, toujours radieux et inaccessible aux maux humains les plus communs. En conséquence, les contraintes naturelles de l’incarnation sont niées et ceux qui les subissent le plus fortement ne se sentent jamais à la hauteur de l’objectif. Ils ne sont jamais vraiment « au top », ils ne font pas partie de la frange bénie des éveillés, ceux qui ne seraient plus touchés par aucune forme de souffrance, ceux qui auraient tout dépassé. Le dommage est notable. Il y a toute une population de chercheurs sincères qui regarde « d’en bas » les conférenciers « au top », s’évertue à les rejoindre, n’y arrive pas, parce que ce « sommet » n’existe pas, et finit par se fatiguer. Cette fatigue pourrait être salutaire (je l’évoquais dans « À bout de course »), mais je constate qu’elle est plus souvent accompagnée d’un sentiment désabusé, d’une colère et d’un rejet fréquent de la spiritualité après des années d’investissement.

La spiritualité nous parle d’humilité et de sagesse, plutôt que d’états supérieurs et de connaissance. Elle balaie sans hésitation toutes les poursuites illusoires pour amener l’attention sur la préparation de l’âme au travers de ce qui nous est réellement donné de vivre. Ce qui ne nous place pas systématiquement « au top ». La spiritualité incarnée est plutôt un chemin de réconciliation avec la condition humaine. Non pas comme une « chute » ou un retour à la misère, mais comme une exploration du réel et de ce qu’il nous offre.

 

 

©Thierry Vissac, Textes, photos et dessins sur toutes les pages du site .