ISTENQS

Ici Se Termine Enfin

Notre Quête Spirituelle

 












S'autoriser la relation personnelle

au Christ



Thierry Vissac

 


 

Nous avons été éduqués à penser que tout se résolvait par notre propre effort, dans le contrôle de notre vie. Nous sommes devenus un peu autocentrés à cause de cela… et solitaires. Nous tournons en rond avec l’espoir de résolutions personnelles sans fin en utilisant de nouvelles méthodes.

Après le temps du développement personnel, cette attention trop tournée sur soi, vient donc le temps de la spiritualité. Je fais une distinction entre ces deux mouvements dans un chemin de vie, même s’ils leur arrivent de se croiser aussi.

La spiritualité ne se définit pas de façon simpliste, on y parle aussi de lien à la nature, de communion aux autres… Pourtant, le noyau de cette spiritualité est dans la relation personnelle au divin. Quelque chose vient se résoudre à cet endroit qu’on ne peut pas produire autrement. Voilà pourtant une expérience bien trop négligée.

Lorsqu’on parle du Divin on a souvent affaire à une abstraction, aujourd’hui. On ne ressent alors pas de lien vivant. Il y a une distance, un flou. On parle du Soi, de l’être, du transcendant etc. J’ai longtemps parlé moi-même de l’intelligence du vivant, pour éviter de donner une image au divin. Les temps n’étaient pas mûrs ; Mais ils ont changé et moi aussi.

La seule façon d’éprouver un lien vivant se trouve dans la relation personnelle avec Dieu. 

Pour que la relation soit personnelle, intime, palpable, il est important de mettre un visage plutôt que de se relier à un grand tout indifférencié, Nous sommes humains et le lien se vit dans le contact, pas dans l’abstraction… mais pas non plus avec n’importe quel être.  

Quel visage est apparu dans cette relation personnelle ? celui du Christ.  

Le Christ parce qu'il est celui qui s’est adressé à nous, dans notre culture et s’est présenté comme le Fils de Dieu. Dieu incarné sur Terre, partageant le destin de l’humain, jusque dans le sacrifice de soi. Bien sûr, je conçois qu’on puisse se le représenter autrement, mais il est important de s’interroger sur la représentation qui va nous aider à nous relier, comme je le fais pour ma part par le biais d’une icône, par exemple.  

Tout n’est pas égal, même si nous vivons dans une époque qui voudrait nous le faire croire ; D’abord, il vaut mieux éviter le polyamour dans ce domaine et savoir s’engager, se donner avec persévérance et fidélité au Dieu Unique de notre cœur. Ensuite, toute autre représentation n’est pas aussi fiable que celle du Christ. Malgré les errances des églises qui ont refroidi notre élan, le Christ est là depuis 2000 ans, un fil doré nous relie à lui au milieu même de l’obscurité. Il n’est pas passé de mode. Il est toujours caché dans notre cœur.  

Mais des interdits se sont mis en place dans nos cœurs (interdits de se représenter Dieu, interdit affectif (indignité, peur de manifester de l’amour à un être invisible), interdit du New-Age (dispersions), interdits de la non dualité...). Il faut donc pouvoir ressentir en soi l'autorisation qui ouvre la relation personnelle avec Dieu. Au-delà de nos arguments intellectuels et rationnels qui s’y opposent et de nos blessures religieuses.  

Je peux me tourner personnellement vers le Christ et lui parler, l’interroger, l’écouter aussi, lui demander quelque chose simplement, ressentir son amour dans un temps d’adoration, comme on dit. Etablir une relation vivante de cœur à cœur qui vient couronner nos démarches plus psychologiques par ailleurs, sans les abandonner parce qu’il est juste de travailler à donner le meilleur de soi.  

Il faut retrouver une innocence pour renouer ce lien, une simplicité d’enfant de dieu. Pas de « toute puissance » ni de pouvoir à cet endroit. On dépose son être, on n’est plus en position de domination ou de méfiance. C’est ce qui change tout.  

Mais il faut sacraliser ce moment de communion avec le divin par le Christ. Pas en faire un moment flou, anodin, un parmi d’autres. C’est un moment consacré. Il est d’ailleurs crucial pour l’enseignant spirituel qui s’efface à cet endroit. Quel soulagement ! quelle épuration ! Et ceci permet le rappel à ses élèves qu’il n’est pas dieu, même pas son fils unique.  

Se relier au Christ offre aussi une autre façon d’être en relation et un autre traitement de la souffrance, des contraintes de l’incarnation. La souffrance, qui n’est pas vue comme une erreur dont il faut se débarrasser, mais quelque chose à porter différemment, quand elle est là, et à déposer aux pieds du Christ. Que ce ne soit pas toujours une résolution matérielle, par un complément alimentaire ou une nouvelle thérapie, mais plutôt apprendre parfois à traverser avec courage dans la présence du Christ.  

Bien sûr, il faut régénérer cette image du Christ, traverser les blessures, les griefs contre l’église, les messes du dimanche imposées dans l’enfance peut-être.  

Le Christ s’est présenté pour créer le lien vers le Père, le dieu inconnaissable. C’est ce qui importe et qu’il faut sauver. Le reste fait partie des fautes humaines.  

L’époque chaotique nous ramène à cette relation, et ce n’est pas un hasard. Ce n’est pas une illusion de revenir à la relation au Christ justement parce que les temps sont durs, car c’est un processus naturel. C’est ainsi qu’il nous ramène à lui aussi.  

Puis il y a la question du féminin dans le divin et Marie reprend sa place aussi, elle est la représentation de la mère divine, celle qui a été choisie pour porter le dieu de chair. Il ne nous manque rien dans cette filiation. Humain, divin, et féminin aussi.  

La relation au Christ est avant tout une expérience intérieure, on la porte dans son cœur. Ce n’est pas qu’une image sur un mur. On nourrit et on entretient ce lien dans son propre cœur, au fil de la journée. C’est l’opportunité de vivre l’amour divin, pas seulement notre amour personnel ou même l’amour impersonnel, mais l’amour de dieu, qui est d’une autre nature, qui constitue la nature divine. Et même si cet amour est plus grand que soi, plus grand que ce qu’on peut manifester individuellement, c’est par la relation personnelle qu’on l’apprivoise et qu’on le reçoit.  

La place de la prière est importante dans cette relation de coeur à coeur. Nous apprenons à savoir ce que nous demandons et à qui nous le demandons. Nous voulons nous améliorer, donner le meilleur de nous-mêmes ? nous voulons guérir ? Nous voulons servir, soutenir le projet d’amour du Christ ? ce sont des avenues différentes qui peuvent être librement exprimées depuis la simplicité du cœur, depuis un déchirement intérieur autant que depuis la gratitude.

 

© Thierry Vissac, Textes, photos et dessins sur toutes les pages du site .