ISTENQS
Ici se termine enfin
Notre quête Spirituelle

Les succès du complotisme

et ses dommages spirituels

 

Thierry Vissac - 2020 -

 


Lors d’une journée de rencontre qui suivait son cours tranquille, l’un des participants intervient soudain sur un thème inhabituel dans nos discussions. Il affirme qu’il s’est bien renseigné, et que « le prochain vaccin va contenir des nanoparticules qui seront injectées dans notre sang et télécommandées par la 5G à travers les antennes relais ». J’ai marqué un instant de silence surpris. Je connais les thèses créatives du complotisme/conspirationnisme mais je ne les avais jamais entendues d’aussi près. Elles étaient jusque-là réduites à mes yeux aux terrains mouvants des réseaux sociaux et ne pénétraient pas beaucoup dans mes cercles de rencontre, en tous cas de façon visible. Et quand il faut parcourir tout le chemin depuis les constructions mentales quasi délirantes pour retourner à une observation saine des phénomènes, je ressens comme une fatigue anticipée face aux tâches impossibles. Mais je fais ce que je dois faire : déconstruire le fantasme généré par la peur pour revenir à l’essentiel.

J’ai mes propres critiques du « système ». Lorsque les « mesures sanitaires » prises pour lutter contre le coronavirus ont été appliquées, j’ai, dès février 2020, publié une série de vidéos alertant sur le vent de folie qui allait se lever et le décalage des prises de position officielles avec le réel. J’ai affirmé que les virus faisaient ce qu’ils voulaient, que les masques étaient une fausse solution, que la façon « d’attraper un virus » n’était pas binaire et se faisait selon des paramètres divers et multiples, que les arguments donnés pour justifier ces mesures étaient pseudo-scientifiques, que la distanciation était le symptôme du virus de la peur et non d’un autre virus, que la nuisance de tout cela était majeure, une forme de terrorisme, etc.

Est-ce cela qui pourrait avoir donné l’impression à ce participant de mon stage que j'étais potentiellement complice de ce courant complotiste ? C’est probable. Mais c’est aussi le signe d’une lecture approximative de ce que je dis réellement. Pas de surprise dans la mesure où les amalgames vont souvent bon train dans ce domaine. J’avais pensé qu’il était facile, en me lisant, ou en m’écoutant, de distinguer mes propos du catastrophisme souvent spectaculaire et sans limite qui imprègne les discours de ces auteurs particuliers. Parce qu’il y a une différence entre l’affirmation « à travers un faux vaccin, on va tenter de nous tuer ou de nous contrôler à distance » et la mienne qui dit en substance « c’est la peur qui motive les mesures autoritaires et le refus d’étudier les forces naturelles du vivant qui nous coupent de la connaissance de ce qu’il faut faire face aux défis de l’existence ».

Ce sont deux mondes différents. Pourtant l’association qui est faite implicitement avec mes paroles finit par les discréditer. Or le discrédit est l’arme la plus puissante pour étouffer une expression. Ce discrédit ne vient pas seulement des médias et du pouvoir, il se développe de cette façon au sein même des groupes qui disent rechercher la vérité.

Je ne suis pas un adepte de la théorie du complot, même si je ne suis pas aveugle face aux tentatives de manipulations médiatiques et du pouvoir en général. Mais l’idée que les médias ou les personnes au pouvoir auraient une organisation impeccable et ordonnée, que leurs équipes, pourtant très égocentrées et toujours en conflit de pouvoir, seraient tout à coup si solidaires qu’elles seraient capables de mettre en place des technologies de science-fiction, à l’insu de tous (sauf des auteurs du complotisme qui semblent avoir des écoutes spéciales que les autres ne possèdent pas), à des fins obscures (nous tuer tous ? nous asservir en masse ? nous télécommander pour… ?), sans qu’il y ait de vraies fuites, ne résiste pas à la réflexion.

Seule la peur peut générer de tels scénarios. Ce qu’on reproche aux médias, par exemple, est plus efficacement réalisé par notre propre cerveau dont les circuits d’alerte sont affolés par nos propres récits destructeurs. Et c’est là où je commence à inviter à revenir à l’essentiel.

Ne justifions pas les scénarios de la peur. La première conspiration contre notre âme est celle-là et elle est de notre fait. Elle prend naissance en soi. Je vais développer l’importance majeure de cette démarche intérieure.

Le désir de contrôler des populations existe, des tentatives ont été menées, mais vous savez quoi ? Ce ne sont pas ces petites conspirations qui « contrôlent » le vivant. L’Intelligence de la vie est aux commandes, partout et tout le temps. Elle n’est jamais débordée par des groupes d’êtres humains qui pourraient être tentés de se prendre pour des dieux et se livrer à des exactions sur l’humanité. C’est tellement vrai qu’elles sont toujours avortées justement à cause du principe entropique des mauvaises intentions : un groupe de personne qui veut se livrer au plus grand « mal » (et ça marche même pour ceux qui voudraient faire le « bien ») se trouve très vite confronté de façon interne à des tiraillements, des trahisons, des désaccords virulents. L’être humain coupé de son âme ne sait agir ni pour le bien commun, ni pour le mal commun. Ses efforts sont avortés, livrés en pâture sur la place publique, dénoncés par des collaborateurs, de telle façon que (et là j’entre provisoirement dans le scénario délirant pour les besoins de l’explication) jamais personne n’aboutira à distribuer un vaccin qui contiendrait de mini-robots infaillibles que toute la population recevrait sans jamais le savoir et sans broncher si bien que nous deviendrions tous des marionnettes incapables de retrouver notre libre arbitre.

Par contre, si on veut bien observer le contenu de ce récit catastrophique, et surtout ce qu’il nous fait ressentir, on va identifier des peurs fondamentales qui intéressent notre démarche spirituelle. Le vrai sujet est là, c’est celui de notre chemin de vie sur cette Terre et de nos « traversées ».

La peur est créative et ne se dissout qu’à sa racine. Si on la laisse mettre en place ses stratégies et ses justifications, elle se solidifie très vite et prend des apparences trompeuses qui font qu’il devient difficile de réparer les dégâts. La peur est diviseuse, elle cherche la rupture en se confortant dans une vision binaire du monde : les méchants et les victimes. Un complotiste ne cherche pas le dialogue, il ne veut pas « savoir », il veut objectiver et consolider la vision d’une partie obscure de l’humanité (bien représentée dans Star Wars, par exemple) qui le menacerait gravement. Les arguments doivent être spectaculaires pour ne laisser aucun doute à ceux qui écoutent (c’est l’intention du moins, mais ça produit souvent l’effet inverse, à moins de vibrer à la même peur).  La peur n’analyse même pas les phénomènes, elle ne voit que la menace et craint dans un cercle vicieux qu’on ne la croie pas !

La peur est l’expression du personnage social coupé de son âme et de la compréhension de nos chemins de vie. Avoir peur du virus (craindre la mort) est la même chose qu’avoir peur de gens qui auraient inventé un virus pour nous asservir. Nous pensons vivre dans un monde menaçant et, privés de la vision du puzzle rassemblé de l’existence, les pires choses peuvent traverser nos esprits. La solution n’est jamais à l’extérieur : ce n’est pas en combattant le pouvoir qu’on va parvenir à réduire "la peur de perdre le contrôle", parce que le sujet est franchement ailleurs. Nous devons puiser dans l’âme et faire émerger ses valeurs pour retrouver le sens de nos vies. C’est la vraie priorité. Ce n’est pas comme s’il fallait se dépêcher de combattre les méchants et que, après seulement, on pourrait s’intéresser à notre vie spirituelle. Les méchants imaginaires ou réels sont en nous, ils sont nous, dans d’autres positions et, surtout, ils font partie du flot de la vie où les causes et conséquences ne sont pas entre nos mains. Nous ne tirons pas plus les ficelles de la vie que ceux que nous croyons être nos ennemis. Mais nous pouvons communier avec l’Intelligence du vivant et déceler dans les situations les plus rocambolesques des réalités divines.

Discutant avec ce participant qui relayait une théorie du complot et ceux qui défendaient sa thèse, j’ai bien entendu qu’il fallait une « information alternative ». Je suis d’accord avec cela. Mais les scénarios de science-fiction ne sont pas de l’information alternative, ce sont des excès générés par notre personnage social affolé (celui qui est coupé de son âme).

Si nous souhaitons une information vraiment alternative, il faut puiser à la source des sources. Alors elle sera vraiment Sourcée.

Je suis critique d’un système qui joue sur la peur (voir les titres médiatiques) mais on ne le contre pas en inventant de nouvelles peurs. Évidemment. Si on veut soutenir le travail d’une information saine et donc alternative, il faut éviter de discréditer ce beau combat avec des armes de destruction massive comme les scénarios pénibles et pathétiques du complotisme. Il faut marquer sa différence, comme je le fais avec ce texte et soutenir que les errances des pouvoirs en place depuis toujours se résolvent dans la vision spirituelle de la vie. On a le droit de s’indigner mais il faut le faire de façon rationnelle et saine (pas besoin d’inventer des choses ou de dramatiser les manipulations au point de les rendre improbables et d’avorter l’argumentation).

Il nous faut donc assainir ce « combat » et, au vu des dommages déjà créés, la tâche va être importante. Je ne dis pas qu’il ne faut rien faire ou rien dire (voir mes propres textes) mais qu’il faut le faire en étant raisonnable[1]. La spiritualité ne devrait pas automatiquement autoriser à ouvrir les vannes de l’absurde.

Je propose aux personnes engagées dans des démarches spirituelles saines de participer au projet des « gardiens de la flamme », celles et ceux qui veillent à protéger la lumière qui nous éclaire et à ne pas céder aux tentations de l’obscurité. Mais comme nous le savons, le sombre peut s’habiller de lumière, comme la peur prétend nous protéger de la menace avec ces déguisements de sauveur (le complotiste saurait quelque chose que nous ne savons pas et veut nous alerter et nous faire trembler avec lui). Nous devons pratiquer le discernement.

Nous sommes des âmes incarnées et notre existence est portée par la puissance de nos chemins de vie. Cette force naturelle, aussi souveraine que toutes les lois de la nature, nous enseigne que nous vivons ce que nous devons vivre. Aucun « méchant » ne viendra empêcher des « gentils » de vivre leurs destins, car tout est inclus dans le même processus cosmique, et rien n’en est extérieur. 

Il faut savoir choisir ses combats. Les plus valeureux sont à l’intérieur de nous et ils tendent ultimement vers l’unité.  

Pour comprendre la démarche globale, lire "Sur deux jambes, émergence de l'âme et traversée de la faille"


[1] Par exemple, on peut légitimement s’inquiéter des composants d’un vaccin, et chercher à en débattre avec les intéressés, voire à alerter si nos recherches, en recoupant les sources (autant faire ce que les médias conventionnels ne font pas toujours, justement, c'est le début de l'alternatif), semblent indiquer qu'il y a problème. Mais on avorte à coup sûr toute forme de débat si on passe au scénario des "petits robots ajoutés au vaccin qui seront pilotés par les antennes relais". Une saine démarche tombe vite à l’eau à cause de ce genre d’exagérations. La rupture est créée. On retrouve ce réflexe de rupture dans toutes les campagnes émotionnelles actuelles, même sur des thèmes pourtant importants : écologie, féminisme, antispécisme... Nous devons sonder notre coeur : si nous aspirons à la réparation, la rupture est le mauvais choix.

 

 

    © Thierry Vissac, Textes, photos et dessins sur toutes les pages du site .